vendredi 24 août 2018

Olivier Debré et Philippe Pasqua : l'art plutôt que la politique

 
Les familles concentrent, en général, des personnalités qui évoluent dans des horizons différents. Dans certaines d’entre elles, le monde politique et le monde artistique se côtoient – plus ou moins. Prenons la famille Debré. Elle a donné à la France plusieurs représentants, à commencer par Michel Debré, père de la constitution de la Ve République, et Premier ministre du général de Gaulle. Prenons aussi la famille Pasqua, avec notamment Charles Pasqua qui, après avoir fini de représenter la maison Ricard, fut un ministre marquant les années Jacques Chirac. Ce ne sont pourtant ni Michel Debré, ni Charles Pasqua qui nous intéressent ici, mais davantage Olivier Debré, frère de Michel, et Philippe Pasqua, neveu de Charles. Deux expositions les concernant permettent de mesurer leur talent, et peut-être même d’affirmer qu’au fil du temps ce seront les noms d’Olivier Debré et de Philippe Pasqua qui resteront dans les mémoires collectives, l’art dominant à tout coup la politique.

Centre de création contemporaine Olivier Debré  - Tours


En 2015, la ville de Tours eut la bonne idée de créer le CCCOD, autrement dit le Centre de création contemporaine Olivier Debré, qui succéda alors au Centre de création contemporaine de Tours. Ce dernier organisme avait déjà, du vivant de l’artiste, collaboré avec lui, le sollicitant notamment pour de très grands formats. Ce fonds Olivier Debré, assez considérable, est situé en Touraine. C’est un choix parfait quand on connaît l’œuvre de l’artiste, dont la Loire fut l’une des principales sources d’inspiration. Encore fallait-il qu’il accepte cet échange avec le centre contemporain de Tours. C’est ce qu’il fit, au-delà même de ce qui avait été envisagé au départ. 

Centre de création contemporaine Olivier Debré - Tours


Centre de création contemporaine Olivier Debré, Tours

Olivier Debré, Ocre-rose rayé d'automne, huile sur toile, 1990-1991, CCCOD, Tours






















Il faut cependant dissiper ici ce qui pourrait être un malentendu. Pour tous ceux, dont nous faisons partie, qui placent Olivier Debré (1920-1999) au plus haut dans l’art français du XXe siècle (aux côtés, par exemple, de Matisse, Bonnard, De Staël ou Hartung), il ne faut pas rechercher, en allant à Tours, un « Musée Olivier Debré ». Peu d’œuvres du peintre sont exposées à la fois, toujours sur un thème ou une période. Il s’agit bien d’un Centre de création contemporaine, qui présente donc, en permanence au rez-de-chaussée un artiste d’aujourd’hui (l’Egyptienne Ghada Amer, actuellement), et au premier étage des toiles du « Maître », présentées chaque année de manière thématique. Après l’inspiration norvégienne de l’an passé, cet été, et jusqu’au 6 janvier 2019, une série intitulée « Les Nymphéas d’Olivier Debré » s’offre au regard. Seulement six toiles sont données à voir. Immenses, elles coupent le souffle. Cette série n’entend pas faire écho à celle de Claude Monet, mais s’en rapproche par les sensations qu’elle dégage, et par la dimension des peintures : environ 3,80 de haut par plus de 9 mètres de large. Des monuments, tout comme ceux de l’Orangerie. A une heure de train de Paris, on n’hésite pas à se rendre au CCCOD…

Olivier Debré, Gris bleu, taches bleues de Loire (détail), 1990-1991, collection BEI, Luxembourg



Centre de création contemporaine Olivier Debré, Jardins François Ier, accès par la rue du Commerce. Ouvert du mardi au dimanche. Possibilité de déjeuner sur place au Café contemporain.

Les ateliers d’Olivier Debré, bref ouvrage de Patrice Debré, fils de l’artiste, procure un éclairage intéressant sur la démarche du peintre (Editions la guépine, Loches, 2018).




Dans l’Essonne, le château de Chamarande est un lieu idéal pour passer une journée à la campagne. Depuis Paris, on prend le RER C à la gare d’Austerlitz, et quarante-cinq minutes plus tard voici Chamarande, sa gare d’opérette, son village au beau clocher, son bistrot crêperie « Le Buffet », où il est agréable de déjeuner en terrasse, ses tracteurs qui passent à l’occasion, car eh oui, bien que tout près de Paris, nous sommes ici en pleine campagne. Cela se sent, d’ailleurs. 

La vie rurale, à Chamarande...


Chamarande est quand même avant tout célèbre pour son château du XVIIe, ou plutôt son immense château, tellement vaste que l’une de ses ailes abrite les Archives départementales de l’Essonne. On pense aux chercheurs qui ont là un lieu de travail propice à produire de grandes choses… On les envie. 

Château de Chamarande - Département de l'Essonne

Château de Chamarande - Essonne

Château de Chamarande - Essonne


Le Domaine de Chamarande, qui inclut le château, appartient au département de l’Essonne. Il contient un parc de 98 hectares, le plus grand jardin public du département. Heureux les villageois et les habitants des environs qui peuvent, tous les jours de l’année, profiter gratuitement de ce lieu ouvert au public. Heureux tous ceux qui peuvent aussi venir y passer « un dimanche à la campagne ».


Peinture de Philippe Pasqua dans le château de Chamarande


Pour mieux faire connaître ce lieu majestueux, le département a choisi d’en faire un site culturel. Les grands salons, à l’intérieur du château, tout comme le parc, se prêtent aux expositions, mais à condition de présenter des artistes qui ont du souffle ! Cela tombe bien, Philippe Pasqua n’en manque pas.
Né à Grasse en 1965, Philippe Pasqua est un artiste contemporain. Son travail impressionne par la force qu’il dégage ainsi que par la dimension de ses œuvres, qu’il s’agisse de toiles, de sculptures ou d’installations. Jusqu’au 31 décembre 2018, le château de Chamarande présente dans ses murs, comme dans son parc, quelques-unes de ses œuvres réunies sous le titre "Allegoria". A l’intérieur, des toiles monumentales, peintes à l’huile ou dans des techniques mixtes, ont notamment pour thème sa famille. Des sculptures et des installations complètent cet ensemble comme ce saisissant « Chant des méduses », œuvre réalisée en verre, qu’il faut voir en entier, et dont voici un détail.


Philippe Pasqua, Le Chant des méduses (détail), 2016, collection The Storage


Dans le parc quatre œuvres monumentales sont aussi exposées. « Face off », œuvre en bronze, mérite de tourner plusieurs fois autour pour en découvrir sa richesse de détails. Mais bien sûr la très spectaculaire sculpture en inox « Who should be scared ? », parfaitement présentée au fond de l’allée d’honneur du parc, attire tous les regards. 


Philippe Pasqua, Who should be scared, 2016, collection Christophe Février


Un mégalodon, autrement dit un requin préhistorique, semble avoir été capturé. Pendu par la queue, il montre encore les dents pour montrer qu’il n’est pas totalement abattu. Quel prédateur a eu sa peau ? Telle est l’une des questions que l’artiste pose dans cette œuvre qui reste dans les mémoires, pas seulement pour son gigantisme. A quarante-cinq minutes de train de Paris, on n’hésite pas à se rendre à Chamarande…

Château de Chamarande - Essonne

Château de Chamarande - Essonne


Domaine de Chamarande : RER C gare d’Austerlitz, direction Saint-Martin d’Etampes, arrêt Chamarande.

Dans ce duo politico-artistique, nous aurions pu aussi évoquer Eva Jospin, fille de Lionel Jospin. Elle présente en ce moment, jusqu’au 14 octobre 2018, ses grandes forêts, réalisées en carton, dans le splendide château de Trévarez, en Bretagne. Nous aurions pu enfin parler du peintre des vies silencieuses Xavier Valls, père de Manuel Valls.
Oui, décidément, rangeons-nous du côté de l’art plutôt que de celui de la politique.



Galerie SR
16, rue de Tocqueville
75017 Paris
01 40 54 90 17




2 commentaires:

  1. Bien belles images, pour un rapprochement auquel il fallait penser. Merci à Stéphane Rochette!

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  2. Chamarande, un nom récupéré par René Boylesve pour désigner un personnage de La Leçon d'amour dans un parc...

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