lundi 14 août 2023

"Peindre l'Ardèche, peindre en Ardèche" : comme un air de dictionnaire

Charles du Besset, Les pins le soir près des Sauvages, coll. part. (D.R)


 

"Peindre l'Ardèche, peindre en Ardèche"








 

L’ouvrage, intitulé Peindre l’Ardèche, peindre en Ardèche, paru en octobre 2022, s’est écoulé en deux mois. Ce fort volume, qui ne rentre dans aucune boite aux lettres (son poids est de 2 kg 600 grammes) a fait partie des « livres de l’année ». Face au succès rencontré, il vient d’être réédité. De quoi satisfaire quelques amateurs d’art curieux – mais aussi de nombreux frustrés !

 

Camille de Soubeyran de Saint-Prix, Grappe de fruits, aquarelle, coll. part. (D.R.)


Abondamment illustré, il rassemble, depuis les origines, les artistes, Ardéchois ou non, qui, à un moment de leur vie, ou de manière continuelle, ont vécu, peint, senti, aimé le Vivarais. Parler des origines n’est pas un vain mot, car, grâce à la grotte Chauvet, l’art pariétal s’invite ici avec des mains et des lions. Le livre ne comprend pas d’artistes vivants. Voilà qui au moins ne froissera aucune susceptibilité. Des peintres célèbres – Raoul Dufy, Max Ernst, Albert Gleizes, Paul Signac – alternent avec des inconnus. Des chefs-d’œuvre se mêlent à des compositions hasardeuses. Tel est le principe même de ce genre d’ouvrage. Cela le rend vivant, car chaque page tournée est une surprise, plus ou moins bonne. Divertissement garanti. L’œil du lecteur est quand même dans l’ensemble ravi, en tous cas toujours surpris.

 

Jeanne Selmersheim-Desgranges, Pêches au compotier jaune, aquarelle, coll. particulière (D.R.)

Un tel livre, que l’on pourrait nommer « Dictionnaire des peintres ardéchois », est l’affaire avant tout d’une personne. C’est Dominique Buis, de Privas, qui se lança dans cette entreprise. Cela occupa plus de quatre ans de sa vie. Diplômée de la Faculté des Lettres de Grenoble, elle fut avant tout psychologue. Voilà une précision utile, car pour gérer cette structure, outre des connaissances en art, une bonne dose de psychologie, dont un calme souverain dans les pires tempêtes – Dominique Buis aime aussi naviguer – ne fut pas superflu. Dominique Buis eut donc l’idée de ce livre. Elle le dirigea et le coordonna. Elle fit le choix d’un grand format carré – une rareté ! – et composa en partie la maquette. Au cours de ce long travail, elle eut pour assistante Marie-Jo Volle et Nathalie Garel. La psychologie ne fut pas non plus inutile à Dominique Buis pour encadrer une cinquantaine d’auteurs – dont la Galerie SR – qui construisirent, chacun à leur manière, selon leur style et leur caractère, un pan de l’édifice. Ce n’est plus une maison qui fut bâtie, mais un grand immeuble, où à chaque étage le goût et la décoration diffèrent. On ouvre une porte, et l’on a envie, ou non, d’entrer à l’intérieur. 

 

René Rochette,  Nuit de Noël, 1912, huile sur isorel, coll. Musée de Valence

 

Dans ce livre de trois-cents pages, et qui compte quatre cents cinquante illustrations, une centaine d’artistes sont ainsi étudiés. Ils sont peintres, dessinateurs ou graveurs. Parfois les trois à la fois. Tous ne gagnèrent pas leur vie grâce à leur art – certains n’en eurent d’ailleurs pas besoin –, mais tous pratiquèrent celui-ci avec sentiment et conviction. Comment ainsi ne pas leur rendre hommage ? Voilà qui est fait. 

 Un certain nombre d’artistes femmes font partie de l’ouvrage, dont Juliette Roche, Leonora Carrington et Jeanne Selmersheim-Desgranges, compagnes respectivement d’Albert Gleizes, Max Ernst et Paul Signac. L’intérêt réside également dans la découverte de peintres oubliés – comme le Valentinois René Rochette (1889-1923) ou l’Américain Roland Wehrheim, dit Bud Wehrheim, mais qui ont pourtant laissé une œuvre authentique et personnelle. Certains des artistes étudiés furent liés à des artistes majeurs, comme Camille de Soubeyran de Saint-Prix avec Gustave Courbet, ou Oscar Chelimsky, voisin et ami de Brancusi, impasse Ronsin, à Paris.

 

 

Roland Wehrheim - dit Bud Wehrheim - dans son atelier, Saint-Maurice-d'Ardèche        







Bud Wehrheim, Clytemnestre, 1965, coll. part. (D.R.)

Evoquons, enfin, le peintre norvégien Ludvig O. Ravensberg, dont le compatriote Edvard Munch fit le portrait. Ravensberg apprécia un temps la vie de château à Vernon. On le comprend.

 

Edvard Munch, Ravensberg, 1909, Musée Munch, Oslo

 
Ludvig O. Ravensberg, Etterstad, 1918, coll. particulière (D.R.)

 

Seuls les grands noms de l’art restent dans l’Histoire… de l’art. Nos mémoires collectives sont limitées. Grâce à ce genre d’ouvrage, des artistes de second ou troisième rang prennent à leur tour la lumière. Ce n’est que justice. Après la publication de cette « Bible » des peintres ardéchois, imprimée sur beau papier, il reste aux Drômois, de l’autre côté du Rhône, à relever le défi et à faire de même… Bon courage !

Pour en revenir à Ravensberg, quelques années plus tard, ce même château de Vernon fut fréquenté par un Président de la République, littéraire et voyageur, dont l’une des sœurs habitait le village. Mais qui donc ? La clé est dans l’ouvrage…

Lire : Peindre l’Ardèche, peindre en Ardèche, Editions Mémoire d’Ardèche et Temps Présent, 2022. Réédition en 2023. 

 

 

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